L'EMOTION CONDUIT A LA LOI
Non, décidément je n'arrive pas à me faire à cette frénésie présidentielle de prendre tout à bras le corps, à ce pouvoir auto-centré et médiatisé de parvenu. Voilà donc un nouvel exemple du délire décisionnel du chef de l'état à propos de l'affaire Evrard.
Il a donc suffit d'un fait divers pédophile pour imaginer qu'il faut changer la loi. La dernière loi sur la récidive des crimes - et donc des crimes pédophiles - date d'à peine 10 jours (loi Dati) ! Or il faut la durcir disait Sarkozy hier, dans sa volonté de répondre à chaud au désarroi d'un père reçu à l'Elysée. Les réactions sarkozystes sont tellement marquées par le besoin d'agir, par le besoin de guérir instantanément les maux de la nation qu'il expertise seul, qu'il ne prend pas le temps de penser les équilibres législatifs, et qu'il va même jusqu'à parler en journaliste, commentant le fait divers comme un pisse-copie, citant la marque du Viagra incriminé, ne se doutant pas qu'un peu de réserve ne fait pas de mal à celui qui prend métier de conduire le destin d'un pays. Il en vient naturellement à être un peu ridicule, mais il ne s'aperçoit de rien. Sur le fond, les questions qu'il pose ne sont peut-être pas les mauvaises mais la méthode est digne d'un chef de village. Je suis toujours atterrée de voir que l'urgence commande le besoin de la loi. Les injustices et les ségrégations naissent souvent d'un empilement de textes qui corrigent à l'infini selon l'actualité. La cohérence n'y gagne jamais, et en matière de justice il semble gravissime de tourner le dos à la sagesse.
Mais de sagesse il n'en est point dans l'attitude d'un chef de l'état qui prend le micro pour faire grossir l'émotion des français, il s'agit juste d'un peu de publicité opportune pour une action réactive. Concernant l'incapacité à se saisir d'une réserve de sage, Audiard avait glissé une phrase merveilleuse dans l'un de ses dialogues : Les cons ça ose tout. C'est même à ça qu'on les reconnaît.
PS : une déclaration estivale de Nicolas Sarkozy illustre bien, à mon sens, la phrase audiardienne. Elle n'a aucun caractère politique mais elle montre à quel point quand on ose on ose : Mon épouse (Cécilia Sarkozy) a contracté une angine blanche (vous savez le joli prétexte de l'angine blanche!) : "Le pire, c'est que c'est moi qui la lui ai passée" avait ajouté l'époux bactérien! Moi je vais appeler Rachida Dati pour qu'elle propose vite fait un texte de loi contre la récidive des déclarations ridicules du chef de l'état.
Julie
Google, au boulot : Présidence de la République - Nicolas Sarkozy chef de village - Fait divers pédophile - loi Dati - Cécilia Sarkozy - Michel Audiard - angine blanche - Les cons ça osent tout - Le pire c'est que c'est moi qui la lui ai passée