LE NON IRLANDAIS EST-IL UN NON A L'EUROPE ?
"Je suis effondré" déclare ce soir le secrétaire d'état français aux affaires européennes, Jean-Pierre Jouyet. Le non du seul pays européen qui devait obligatoirement voter - dispositif constitutionnel interne à ce pays de 4 millions d'habitants - pour le redémarrage politique de l'UE, est une claque magistrale, une seconde claque magistrale, au système technocratique qui prévaut à Bruxelles. Le Plan B version 2008, largement influencé par la personnalité de Sarkozy, auto-proclamé sauveur de l'Europe, dit aussi "traité simplifié", dit aussi traité de Lisbonne, est mort.
Les raisons de ce vote sanction sont, à vrai dire, les mêmes que celles du non français naguère : une défiance vis-à-vis du politique, une absence totale de pédagogie, la porte ouverte aux fantasmes nationaux de tous ordre. Bref, les irlandais ont voté en âme et conscience, il serait malséant de leur jeter la pierre qui devait construire l'édifice !
Et maintenant? On trouvera sûrement le moyen en haut lieu de ne pas se ridiculiser et de faire comme si de rien n'était. Bah, murmure-t-on dans les milieux autorisés, on négociera avec les irlandais de nation à organisation supra-nationale... Parfait ! On bafouera donc le vote d'aujourd'hui. Les petits arrangements entre amis vont sans vergogne commencer ce soir...
Quel gâchis, pourtant, quand on pense à la manière fédéraliste dont tout cela aurait pu se passer. Nos états manquent de couilles, et s'enferrent dans des textes technocratiques qui les rassurent. Il me souvient que Daniel Cohn-Bendit avait eu la meilleure idée politique sur ce dossier en déclarant, au moment du "non" français : Mais pourquoi n'avons-nous pas eu le courage de créer un référendum purement européen, un référendum de tous les états membres, le même jour, dont le dépouillement aurait dépassé les clivages nationaux et auraient donné une majorité européenne au texte de Giscard? Le même jour. Le même texte soumis au vote. Un dépouillement à l'échelle de l'Europe. Une majorité à cette même échelle. Une excellente perspective, en effet. Personne n'a écouté Cohn-Bendit, trop fédéraliste sans doute, trop avant-gardiste sans doute. On a préféré croire que le petit Sarkozy, avec sa fougue jouée, se plaçant au-dessus d'une Merkel plus diplomate et plus vertueuse, allait impulser à lui seul la nouvelle Europe de demain. Echec, triste échec, un échec de plus pour la diplomatie d'une France qui ferait mieux de se la jouer (de se la jouyet) modeste devant ce cataclysme. Heureux européens, vous avez la chance de dire non, mais c'est au détriment de votre existence !
Allez, une conclusion pour répondre à ma question : je ne pense pas que la réactivité irlandaise soit une claque à l'Europe, mais elle montre de toute évidence qu'on fait mal l'Europe ou mieux qu'on ne la fait pas assez ! CQFD ?
Julie
Google, au boulot : Europe - Le non irlandais - Nicolas Sarkozy - Angela Merkel - Daniel Cohn-Bendit - Jean-Peirre Jouyet effondré